Principes politiques et doctrine géostratégique

 Lazare Carnot Wattignies « Et en même temps le socialisme, socialisme français, socialisme international, se préoccupait de mettre au service de la liberté des nations des moyens de défense conformes au génie de peuples libres : plus d’armée de métier, plus d’armée de caste, plus de corps d’officiers aristocratiquement ou bourgeoisement recrutés et élevés à part dans des écoles closes : le peuple lui-même, le peuple en armes, le peuple organisé, le peuple formant ses milices, le peuple choisissant ses chefs, et ces chefs eux-mêmes pénétrés de science, pénétrés de démocratie, mêlés à la vie moderne. Voilà, en attendant l’heure du désarmement général, la forme de l’appareil militaire que l’internationale prescrit pour sauver l’indépendance des nations de toute agression extérieure, tout en empêchant les agressions et la domination de classe sur le peuple asservi. » – Jean Jaurès, 1907

La France doit parler de sa propre voix sur le plan géopolitique. La politique étrangère française doit être basée sur une souveraineté nationale refusant l’enfermement dans une alliance basée sur une appartenance supposée à la “civilisation occidentale”.

Les deux derniers Livres Blancs sur la Défense prétendent qu’existe “entre les États-Unis, le Canada et l’Europe une profonde communauté de valeurs et d’intérêts”, et réduit le reste du monde à des “menaces” et autres “risques”. Contre ces postulats qui ravivent des présupposés identitaires ethno-religieux ou “culturelles”, et mettent les “droits de l’homme” au service de politiques impérialistes, il faut réaffirmer que la position de la France dans le monde doit être définie à partir des principes politiques à vocation universelle résumés dans la devise « Liberté, Égalité, Fraternité ». Parallèlement au rejet du Grand Marché Transatlantique, la France doit quitter l’Otan, bras armé de l’intérêt des États-Unis d’Amérique, qui s’est mué depuis les années 1990 en “alliance globale” susceptible d’intervenir partout. De même, l’Europe de la défense n’ayant jamais été pensée en dehors d’un cadre strictement atlantiste, il serait en l’état irresponsable de lui sacrifier notre capacité de défense souveraine. Grâce à une défense souveraine, nous remettrons en cause les Traités européens

Concept réactivé par les néoconservateurs, la “guerre au terrorisme” est une impasse qui renforce les ennemis qu’elle prétend combattre. La seule lutte efficace contre les actes terroristes repose sur un renseignement appuyé par des opérations de police, et des solutions politiques à l’international visant à en supprimer les causes. A rebours de la multiplication des interventions extérieures décidées sur cette base par Sarkozy et Hollande, il faut inscrire dans la constitution que, sauf cas exceptionnels, seul le peuple pourra décider de la paix ou de la guerre.

Pour que la France (re)devienne une puissance de paix, elle ne devrait pas pouvoir intervenir militairement hors de ses frontières en dehors d’opérations encadrées par une ONU réformée. Enfin, les principes républicains doivent être réaffirmés, à commencer par celui du monopole de l’État sur les armes de guerre. L’industrie de l’armement doit être intégrée à un pôle public de l’armement exclusif. Face aux dérives liées à la professionnalisation, qui tend à faire de l’armée un corps étranger à la nation, que certains veulent à terme utiliser dans le cadre de missions de maintien de l’ordre sur le territoire national, un débat doit être ouvert pour mettre fin à la suspension de la conscription. Le service national que nous proposons serait ouvert aux hommes et aux femmes, et élargi à de nombreuses activités civiques d’intérêt national ne se résumant pas à la seule formation militaire.

Au contraire de ce qui y voit un isolement, la souveraineté nationale ainsi définie est la condition d’une nouvelle politique internationaliste basée sur l’écosocialisme. De toute urgence, la France doit réorienter ses alliances en tenant compte des transformations réelles du monde. Sans pour autant souscrire à leurs régimes politiques, elle a vocation à coopérer en matière militaire et monétaire, dans le cadre de l’ONU, avec les puissances – en particulier les pays dits émergents, BRICS en tête – qui ont comme elle intérêt à l’avènement pacifique d’un monde multipolaire débarrassé de l’impérialisme étasunien. A moyen terme, face aux risques géopolitiques immenses induits par l’accroissement des inégalités et l’absence de planification écologique à l’échelle international, la France doit, dans l’esprit de la Charte de la Havane de 1948, mettre son poids au service de nouvelles politiques internationales marquées par la coopération économique et la relocalisation de toutes les productions qui peuvent l’être.

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